vendredi 7 janvier 2011

LES ANGLAIS DEBARQUENT SUR LES ILES SAINT MARCOUF

Les Anglais débarquent sur les îles Saint Marcouf

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Bien avant l’année 1795, date du débarquement des Anglais aux îles Saint-Marcouf, les navires de cet Etat voguaient dans les parages de la baie de Seine et particulièrement alentours des îles en interceptant le trafic maritime et entravant sérieusement nos communications maritimes de commerce et de pêche. De nombreux rapports font état de la présence de la flotte anglaise dans cette région.
Les navires ennemis n’hésitant pas le moins du monde à attaquer au canon nos positions et ce, malgré la présence de navires de guerre français.

Une lettre de Cherbourg datée du 17 Messidor de l’an 3 (5 juillet 1795) relate cet état de guerre (Arch. Nat. BB3-69 marine f° 105).

Le sous-chef de classe de la Hougue vient informer Cherbourg qu’une frégate anglaise faisant partie d’une division de neuf autres bâtiments de guerre, a attaqué hier à neuf heures du matin la corvette La Vigilante qui s’était mise sous la protection du fort de la Hougue. Après deux heures de combat soutenu par la Vigilante et le fort, la frégate anglaise s’est retirée dématée de deux mâts de hune qu’elle répare sur la rade ou elle est mouillée avec les autres à peu de distance de la baye de la Hougue.

Quelques jours après le danger devenait réalité comme le montre ce courrier du 20 Messidor.
Lettre adressée à la Commission de la Marine et des Colonies à Paris.

Trois frégates et trois bricks ont fait route à l’Est (le 17) ils sont restés prés des îles de Saint Marcouf, ou leurs équipages ont débarqués et parvinrent avec des chaloupes à y mettre quantité de monde à terre qui ont elevé  plusieurs tentes. On a observé sur l’une des isles Saint Marcouf (isle de terre) 10 à 12 hommes occupés à travailler, mais la brume a empêché de distinguer à quel genre de travail ils se livraient.

Toute cette opération de débarquement fut menée par le major anglais Price, sans aucune opposition de la part de la France, car notre présence dans la baie de Saint-Vaast-la-Hougue était bien trop faible, et les îles saint Marcouf étaient désertes.

Pendant que les Anglais s’installent au mieux sur les îles saint Marcouf, les autorités de Saint-Vaast-la-Hougue se livrent à l’observation des travaux anglais qui semblent vouloir jouer la durée. Les frégates anglaises ont quitté leur mouillage aux îles et ne sont plus en vue dans la baie. Mais leur présence  est  cependant  confirmée sur les îles
d’après une lettre de Cherbourg du 24 Messidor de cette même année de l’an 3 (1795)

Lettre de Cherbourg 24 Messidor an 3, de l’agent Maritime.
A la commission de la Marine et des Colonies à Paris (suite de BB3 69 marine)

Citoyen Commissaire

La position de l’ennemie prés les isles Saint Marcouf est toujours la même, c’est à dire que deux bombardes, deux cannoniéres et un brick y sont toujours mouillés, les frégates ont abandonnée et ne sont plus en ce moment à la vue ; il a débarqué des hommes et deux canons sur une des isles et chaque jour il en tire un coup et arbore son pavillon.
On y entend souvent aussi le son du tambour, c’est le résultat des observations que le sous-chef du quartier de la Hougue à soin de faire faire de tous leurs mouvements et qu’il me fait connaître exactement.

Salut et Fraternité
Baudoin


Pendant ce temps à Saint-Vaast-la-Hougue, le sous-chef des bureaux civils de la Marine et le capitaine Guilmier commandant de la rade donnèrent l’ordre au cutter le « Granville » et à l’aviso  « l’Etoile du matin » de se porter vers les îles saint Marcouf pour y effectuer des observations sur la position des Anglais dans les îles, mais ils furent accueillis par des coups de canons tirés depuis l’île de terre (Arch. Nat. BB3-69 marine f°120).

Extrait du journal de l’aviso de la République l’Etoile du matin, capitaine Casteleyu du 19 au 20 Messidor  an 3

A huit heures et demie du matin j’ai appareillé du port de la Hougue en compagnie avec le cutter le Granville capitaine Terrier pour observer les deux bombardes et le brick anglais qui étaient mouillés aux isles Saint Marcouf. A 10 heures, je me suis aperçu que les bombardes tirent plusieurs coups de canons qui furent répondu par d’autres des isles Saint Marcouf ; à la même heure j’aperçu que des canots remplis de monde allaient et venaient des bords à terre et de terre à bord des navires ennemis, ils assurent leur pavillon à terre d’un coup de canon.
A onze heure et demie étant à portée et demie de leurs canons je vire de bord et assure mon pavillon d’un coup de canon à boulet. Le capitaine Terrier en fit de même et nous fîmes route vers la Hougue ayant tous les bateaux pêcheurs autour de nous. A trois heures et demie je suis venu mouiller sous l’isle Tatihou (Arch. Nat. BB3-69 marine f°121).

Vers la fin de juillet-début août 1795 les Anglais renforcent le  dispositif  d’armement des îles saint Marcouf car le cutter
« Hardy », capitaine Henry, a observé autour des îles la flotte anglaise suivante :

3 frégates de premier rang
2 bricks ou corvettes
6 canonnières en goélette
3 galiotes à bombes
1 cutter

Il y avait sur les îles saint Marcouf, celle du large, 3 canons près de l’ancienne chapelle et dirigés vers l’Est, et 2 autres canons orientés Sud ; sur cette île cinq tentes étaient installées. Sur l’autre île, donc celle de terre, un petit fort a été construit armé de cinq canons et cinq tentes étaient dressées.(Arch. Nat. BB3-69 marine f° 123)

Fin août 1795, vers 4 heures du matin, les Anglais mouillés sous les îles saint Marcouf mirent à la voile au nombre de douze bâtiments, un de leur aviso, une canonnière et trois canots portèrent leur bordée du côté de l’île Tatihou, les autres navires restèrent au large en louvoyant. (Arch. Nat. BB3-69 marine f° 126).

Les rapports venant de la Hougue sont toujours aussi alarmants et rien ne semble arrêter l’ardeur que les Anglais mettent à fortifier les îles. Les observations font état de deux forts sur chacun des îles ; nous sommes à la fin de l’année révolutionnaire de 1795.
       Les renseignements les plus fantaisistes parviennent à la Hougue, jusqu’au jour ou un événement inattendu vint apporter quelques lumières sur l’armement de ces îles.

Durant la dernière semaine de septembre 1795, deux déserteurs, l’un anglais et l’autre suédois, se sont échappés des îles saint Marcouf à la faveur d’une marée propice à ce genre d’entreprise. C’est en voulant échapper à des brimades de l’armée anglaise qu’ils s’enfuirent à bord d’un canot volé aux Anglais à la faveur de la nuit. Nos deux déserteurs débarquèrent sur la côte près de Quineville et furent ensuite conduits au camp de Valognes pour y être interrogés. C’est ainsi que l’on apprit qu’il y avait sur les îles saint Marcouf trois émigrés. Nous l’avons compris, ces derniers, voulant échapper à la rage révolutionnaire, souhaitaient passer en Angleterre en utilisant les services de cette nation qui apportait un soutien aux royalistes.

Dans la foulée de ce premier événement, et nous sommes au début de l’an 4, soit fin septembre, début octobre 1795, arrivent à La Hougue quatre marins déserteurs, venant des îles Saint-Marcouf. Ils furent consignés au secret sur la corvette « la Vigilante ». Ces quatre marins s’enfuirent des îles à l’aide d’un canot à clin d’une longueur de 20 pieds.
Les noms de ces marins étaient 

         Johns âgé de 33 ans, de Philadelphie
Jean Maugaumery, 27 ans, charpentier de Philadelphie
Thomas Jahusan, 21 ans,  matelot de Philadelphie
Stafford Muller, 20 ans,  matelot de Norfolk

Il s’agissait des marins d’un navire de 250 tonneaux, et 10 hommes ? dont le capitaine William Loye, parti de Philadelphie avec un chargement de farine et viande salée, pour Lorient.

Ce navire gréé de trois mâts, « Emsly », rencontra vers la fin du mois de juin la frégate anglaise « Diamant » de 36 canons au large des forts de Lorient, et cette dernière arraisonna le navire américain, et mit à son bord cinq marins, dont les quatre décrits ci-dessus, le cinquième marin étant toujours aux mains des Anglais aux îles Saint-Marcouf, du nom de Guillaume Haris, âgé de 50 ans environ.

Quant au bâtiment « Emsly », les Anglais y mettrons un équipage de prise de 12 soldats et 5 marins afin de conduire cette prise à Plymouth.

La frégate anglaise a ensuite continué son voyage le  long  des côtes  Françaises  avec  ses  cinq prisonniers
jusqu’au 16 Messidor, jour du combat avec la corvette française la « Vigilante » sous le fort de la Hougue.
Les quatre marins échappés étaient donc à bord de la frégate anglaise lors du combat avec la « Vigilante » et purent relater les faits aux Français. Les dégâts occasionnés au navire anglais étaient en réalité la perte du petit mât de hune et la destruction partielle du grand mât ; la voilure avait également beaucoup souffert, plusieurs boulets avaient pénétré la coque par la poupe.

Dans ce combat, le premier lieutenant a été tué, le maître eu le même sort, l’officier de quart perdit une jambe, et un mousse a été blessé. Trois ou quatre jours après cet engagement, la frégate anglaise fut obligée de retourner à Plymouth pour faire les réparations qui s’imposaient.

L’interrogation des échappés de Saint-Marcouf faisait apparaître qu’il y avait sur les îles environs 120 hommes parmi lesquels quelques Américains, des Indiens, et trois ou quatre  Français.

La description faite par nos échappés des îles Saint-Marcouf laisse apparaître que l’armement des îles se compose sur l’île du large de batteries en pierres et en terre,  et  d’une  artillerie  de  4  canons  de calibre  48 en fonte monté sur pivot, de 4 autres de calibre 24 en fer et 16 caronades de 18 également en fer. Sur l’île de terre il y a quelques batteries de même construction que sur l’autre île avec, pour artillerie, 3 canons de 32 en fer, 5 canons  de 24  très longs en fer, ainsi que deux autres de même calibre mais posés à fleur d’eau et orientés vers la côte du Cotentin. Outre cet armement, il existe sur cette île des mortiers dont ils ignorent le nombre, et deux grils avec leur forge ou 24 boulets peuvent être chauffés à la fois.

Les marins rapportent que des baraques sont construites pour ranger le matériel de guerre, et les Anglais attendaient des transports de bois pour construire d’autres baraques afin d’abriter les marins anglais pendant l’hiver.
Pour la subsistance, chaque Anglais avait droit à 1 livre de biscuit, 1 livre de viande salée, ou ½ livre de pois, ½ pinte de rhum par jour, les stocks de l’île assurent 3 semaines de vie.

La correspondance avec l’Angleterre est assurée par 3 frégates, dont le « Diamant ». Chaque frégate porte de 350 à 360 hommes et est armée de 28 canons de 18 et de 12 caronades de 24.

La protection nautique des îles est confiée à deux canonnières, le « Moustique » et la « Force », montée chacune de 40 hommes et armée de deux canons de 24, douze caronades de 18, deux canons de 4, et deux pierriers de 2.
Cette flottille est renforcé par la présence de trois galiotes bombardes, « L’Epervier », « La Fouine », « Le Serpent », les deux premiers bâtiments sont armé de deux canons de 24, et de deux canons de 32. Le commandement des îles est sous les ordres du lieutenant Price.

Les marins échappés des îles disent avoir été occupés toute la journée aux fortifications de l’île de terre, et que le soir arrivé, ils ont été envoyés à bord de la goélette canonnière « La Force » pour se reposer.

Quand à leur évasion, elle se fit à la faveur de la nuit pendant le sommeil des gardiens ayant préalablement pris soin de placer sur le canot du bord des effets ainsi que deux fusils, une paire de pistolets, de la poudre, et une giberne anglaise remplie de quinze cartouches. Par contre, ils décidèrent de ne pas réveiller Guillaume Haris pour ne pas compromettre leur aventure, celui-ci ayant pris le parti anglais. Vers onze heures du soir, les quatre marins embarquèrent sur le canot et sans bruit larguèrent les amarres, puis mirent le cap sur la côte à la voile, quant, au petit matin, ils aperçurent les côtes françaises et quelques bâtiments, ils prirent les avirons et rentrèrent au port de La Hougue à six heures du matin. (Arch. Nat. BB3-69 marine f° 129 et suiv.)

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